lecture Les hosties sont leur gagne-pain
Article dans "La Liberté" du 13 janvier 2012
photos Alain Wicht, texte Tamara Bongard

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Chaque hostie pèse 0,035 gramme. Elle est vendue 7 centimes.

13/01/2012
Les hosties sont leur gagne-pain
Romont • L’atelier de pains d’autel de l’abbaye de la Fille-Dieu, qui produit 1,1 million de pièces par année,a subi d’importants travaux. La modernisation des installations permet aux Soeurs d’assurer leur revenu.

«La fabrication d’hosties est notre principal revenu», explique Soeur Claire, en entrant dans l’ancienne ferme rénovée qui sert désormais d’atelier. «Nous produisons environ 1,1 million de pièces chaque année.» L’abbaye de la Fille-Dieu à Romont en fournit à des communautés et des paroisses de toute la Suisse, jusqu’au Tessin. Tout comme cinq autres monastères romands: l’abbaye de la Maigrauge et le monastère de Montorge à Fribourg, le monastère des Dominicaines à Estavayer-le-Lac ainsi que les Soeurs bernardines de Collombey et le monastère de Géronde en Valais.
La communauté de quinze Soeurs a dû aménager de nouveaux locaux en raison du coût important de la rénovation de sa machine à cuisson des hosties, appelées plutôt pains d’autel puisque non consacrées. Elle en a profité pour réorganiser entièrement sa production et racheter un nouvel appareil. La ferme, qui ne servait plus, était le local tout désigné.

Communauté religieuse ou non, les lois du marché sont les mêmes partout. «On sent la baisse de la pratique», indique Soeur Claire, qui voit une diminution des commandes, dont une bonne partie est faite via internet. Mais cela ne la désespère pas. Toutes les trois semaines, elle prépare la pâte à pain d’autel, composée pour moitié de farine et pour moitié d’eau. Pour les brunes – les plus demandées – le mélange doit fermenter une nuit.

Et un tour de manivelle
La cistercienne reprend son travail le lendemain après les vigiles, de 4h50 à 6h30. Puis Claude Sallin, employé de la Fille-Dieu, prend le relais jusqu’à 8h30, après la messe. Et Soeur Claire poursuit jusqu’à 11h30. Il faut bien cela pour façonner les sept bassines de cinquante litres de mélange.
La nouvelle machine à cuire toute neuve, est composée de plusieurs fours – comparables aux fers à bricelets mais sans dessin. Leurs couvercles s’ouvrent et se ferment automatiquement, tout comme la pâte qui s’y répand. Quand la quantité de mélange n’est pas adaptée, la moniale donne un tour de manivelle dans la machine, comme pour faire démarrer une vieille voiture. Le tout dans un bruit assourdissant, mais qui n’empêche pas de prier assure la religieuse.

Un gain de temps
Soeur Claire doit aussi humidifier les plaques de ces fours et éventuellement les gratter avant chaque pression. Pourquoi? «C’est une machine française, mais la farine suisse contient davantage de gluten», répond la cistercienne. Pour le reste, on est dans le régional. La farine vient du moulin de Romont, à deux pas de là. «On pourrait presque la transporter sur une planche à roulettes», commente la facétieuse religieuse. Et les déchets de production sont donnés à des agriculteurs pour nourrir le bétail.
Quand la pâte est pressée, Soeur Claire décolle ces plaques rectangulaires de pain d’autel à l’aide d’un racloir. Puis elle les range dans une armoire, où elles pourront refroidir gentiment pendant un jour. «J’appelle ça la cellule de dégrisement», sourit la Glânoise.
C’est uniquement quand elles en auront besoin que Soeur Josette, responsable des hosties, et Soeur Cécile se chargeront de découper les pains d’autel, empilés en «gâteau». La découpe sera réalisée grâce à une machine numérique, qui après un réglage peut formater des hosties de toutes les tailles. «Avant, les Soeurs prenaient 25 minutes pour découper un gâteau au lieu de huit minutes. Nous sommes moins nombreuses actuellement, nous devons travailler plus vite. L’abbaye a compté jusqu’à nonante Soeurs et on est descendu jusqu’à cinq», poursuit celle qui a pris le voile il y a vingt ans.

En période d’essai
Installés dans des caisses, ces pains d’autel, dont chacun pèse 0,035 gramme, doivent ensuite être conditionnés. Une caisse contient 2,870 kg d’hosties, soit à peu près 8000 pièces, vendues 7 centimes l’unité. «On en glisse
environ 200 de plus, s’il y a de la casse», assure la moniale.
Mis à part le crucifix sur les murs et l’habit des Soeurs, on a finalement l’impression d’être dans n’importe quelle entreprise. La Fille-Dieu, qui doit actuellement livrer 100000 hosties à une communauté valaisanne, est en période d’essai de quatre mois sur ce contrat. «Nous verrons si cela nous convient et leur convient», résume la cistercienne. Ce sont des amis du monastère valaisan qui viendront chercher ces caisses. Mais il arrive que les
Soeurs de la Fille-Dieu envoient leur production par la poste, ce qui engendre des frais plus importants.
Si l’atelier d’hosties est à nouveau fonctionnel depuis janvier, les derniers aménagements ne sont pas encore tout à fait terminés. Quand l’ancienne pièce servant à la fabrication des hosties sera réaménagée, elle pourra accueillir la production des moutardes à l’ancienne et des sauces aux herbes, qui squattent actuellement l’atelier de pains d’autel. «Dans deux ou quatre mois, tout sera centralisé», sourit Soeur Claire.I


tamara bongard

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