Après la rénovation des cellules, la prochaine étape qui attend Sœur
Marie-Claire et sa communauté, c’est la restauration de l’hôtellerie |
Quand on réalise
l’ampleur de l’œuvre de restauration accomplie depuis la fondation de
l’Association des amis de la Fille-Dieu, en 1987, on est impressionné. Et
pas seulement à cause de l’importance des fonds engagés: 8,6 mio jusqu’à
présent, dont 6 mio pour l’église (cette étape avait nécessité cinq ans de
travaux, auxquels l’association contribua à hauteur de 4 mio).
L’entreprise frappe aussi par l’élan de solidarité de l’Association des
amis de la Fille-Dieu, qui la porte depuis le commencement. A quelques
jours de l’assemblée générale (ce samedi 30 avril 2005), le comité, la
mère abbesse – Sœur Marie-Claire Pauchard – et l’architecte Tomas Mikulas
ont tenu à faire le point autant qu’à rameuter les troupes.
«Avec l’église, une très grande étape s’est achevée, suivie de travaux
moins spectaculaires. Mais il reste encore beaucoup à faire. L’Association
des amis de la Fille-Dieu a plus que jamais son rôle à jouer», dit Michel
Schmoutz, ancien syndic de Romont et président de la commission de
construction.
«L’abbaye est un lieu de vie et de prière depuis plus de 700 ans. L’élan
de générosité a été merveilleux jusqu’à présent. Il importe d’entretenir
la flamme. Et pour cela, il faut avoir des projets.» Et de projets,
l’association ne manque pas, chaque nouvelle restitution de pierres du
passé mettant en évidence l’obsolescence des parties de l’abbaye qui n’ont
pas encore pu être restaurées… «On navigue entre vision globale et étapes
de travaux, selon les urgences et les fonds disponibles, en fonction aussi
des priorités de la vie monacale», résume Tomas Mikulas.
Car il reste une grosse étape, qui n’est pas encore chiffrée ni planifiée,
mais qui nécessitera un investissement presque aussi important que pour
l’église. Il s’agit de l’hôtellerie, une volumineuse bâtisse qui,
transformée en 1695, conserve encore de précieux éléments gothiques
témoignant des origines médiévales du monastère, «sans parler de tout ce
qu’on n’a pas encore découvert. C’est une perle enfouie qu’il va falloir
remettre en valeur», commente Tomas Mikulas, qui confie que la
restauration de la Fille-Dieu est un peu l’œuvre de sa vie. |
Un havre de paix
En 1872, une hôtellerie à trois étages avait été construite dans les deux
tiers de la nef de l’église, des locaux supprimés lors de restauration du
sanctuaire. Le fermier de la Fille-Dieu et sa famille ont longtemps occupé
le bâtiment avant la construction de leur nouvelle maison sur le domaine
de l’abbaye.
Décapité, malmené, aménagé au gré la chance au fil du temps, le bâtiment
de l’hôtellerie nécessitera des soins intensifs pour retrouver sa
cohérence architecturale et esthétique, et surtout sa fonction d’accueil.
L’association pourrait y trouver un espace pour ses assemblées générales
qui, faute de place ailleurs, ont lieu dans l’église. Dans la foulée, la
petite boutique de l’abbaye serait mise en valeur.
Plus important: l’abbaye serait alors en mesure de répondre à une demande
de plus en plus forte de la part du monde extérieur, justifie Mère
Marie-Claire. Traditionnellement, l’hôtellerie, dans une abbaye, est un
lieu-source, un espace de silence, de recueillement, où les retraitants,
quels qu’ils soient – familles des religieuses en visite, pèlerins sur le
chemin de Saint-Jacques, ou gens traversant une crise existentielle ou
spirituelle – pourraient se reposer, le temps de prendre un recul
salutaire.
En 1988, à une assemblée des Amis, l’évêque d’alors, Mgr Mamie, était venu
parler de la soif de retraite de ceux qu’il appelait «les requérants
d’absolu» ou «les émigrés d’eux-mêmes». Des gens à la recherche d’un havre
de paix, vivifié par la foi et la sagesse des moniales, pour se reposer
des vicissitudes du monde et, «reboussolés», reprendre la route…
Amis à multiplier
On a pu penser que, l’église ayant retrouvé sa splendeur, l’effort pouvait
être relâché. On voit qu’il n’en est rien… En 2004, l’association,
présidée par le conseiller aux Etats Urs Schwaller, comptait 1156
cotisants, plus les membres à vie. «Quand des amis décèdent, les relais ne
se font pas systématiquement avec leurs descendants. Nous sommes aussi
surpris de voir que bien des Romontois ignorent qu’ils peuvent devenir
membres de l’association, moyennant une modeste cotisation», observe
Michel Schmoutz, en espérant que l’appel sera entendu à l’aube d’une
nouvelle et grande étape de travaux.
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Plusieurs séries
des travaux réalisés après l’étape de l’église ont concerné le
quotidien des moniales, qui vivaient dans des conditions spartiates.
La rénovation de la cuisine de l’abbaye n’était pas un luxe, pas
plus que le réaménagement des cellules. Cette phase de travaux est
aujourd’hui achevée.
Au second étage du cloître, cet espace n’a plus rien de commun avec
l’antique dortoir où, jusque vers 1970, cloisons basses et rideaux
faisaient office de séparations. Les réaménagements d’il y a trente
ans, sommaires, avaient un peu amélioré les choses. Mais à la suite
des interventions pas très heureuses sur le plancher sous la
toiture, «la déformation de la charpente, de l’ordre de cinq
centimètres sur la largeur du bâtiment, se constatait à l’œil nu sur
les dessins des relevés», constate l’architecte Tomas Mikulas.
Au fil des années, on avait aussi «bricolé» ça et là des équipements
sanitaires de fortune et l’isolation phonique des cellules,
médiocre, n’était guère favorable au repos et à la préservation de
la sphère privée des moniales. C’est dire la difficulté de la tâche
pour les ouvriers. Mais le défi a été relevé. Les structures
anciennes de 1726 ont été maintenues et consolidées. Sans agrandir
l’espace, on a créé une série de douze «chambrettes», modernes, mais
sobres et ergonomiques.
Autre étape, en cours de finition: le
scriptorium, au premier étage
du même bâtiment, sous les cellules des religieuses. Cette salle
d’études spirituelles est, avec l’église et le chapitre, l’un des
lieux majeurs de l’abbaye. Là aussi, il a fallu corriger les
interventions du passé, escamoter des descentes de tuyaux, rajouter
des caissons et des piliers, remettre en valeur une circulation
latérale et faire entrer la lumière par des éléments de bibliothèque
transparents. Un espace de vie qui occupe dorénavant sa place
d’honneur. Restera encore à améliorer le réfectoire, puis le préau…
Et l’hôtellerie, musique d’avenir.
«Travailler dans des pierres imprégnées d’histoire est une œuvre
exaltante. Il faut avoir beaucoup de foi et de courage pour se
lancer dans une telle aventure», conclut Tomas Mikulas à l’adresse
des moniales qui, dépositaires de ce patrimoine et chargées de le
transmettre aux générations futures, ont dû s’adapter à quinze ans
de chantiers successifs en un lieu où la louange de Dieu et la
prière sont ininterrompues depuis la fondation de l’abbaye, en 1268.
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